12 000 km : c’est la longueur du nouveau câble sous-marin de télécommunication à fibre optique qui va relier Marseille au Pakistan. La nouvelle annoncée l’été 2020 est quelque peu passée inaperçue, du fait d’un contexte sanitaire préoccupant, et pourtant elle a des répercussions économiques, stratégiques et technologiques considérables. Satellites, 5G, si tous ces sujets alimentent plus l’imaginaire collectif et sont sujets à plus de fantasmes, il n’en reste pas moins qu’ils obstruent une réalité significative : plus de 99% du trafic Internet passe par des câbles sous-marins.
Une capacité mille fois plus importante des câbles sous-marins
La bataille entre États pour une souveraineté de leur accès à Internet se joue donc beaucoup plus sous les eaux que dans les cieux. En 2020, plus de 473 câbles sous-marins sont répertoriés à travers le monde pour une longueur totale d’environ 1,3 million de kilomètres. Les raisons en sont à la fois multiples et assez simples dans les grandes lignes. Technologiquement, les câbles permettent de véhiculer toutes sortes de donnée, textes, signaux téléphoniques, photo, vidéo, Internet haut débit et télévision numérique haute définition. Leur capacité est estimée de l’ordre de 1 000 fois plus que les satellites. Économiquement, « le câble sous-marin est devenu bien plus rentable que le satellite, de l’ordre de cent fois plus ».
Une montée en puissance exponentielle
Les câbles sous-marins ne constituent d’ailleurs pas une nouveauté. Le premier à voir le jour a été posé dès 1851 entre le cap Gris-Nez et Southampton pour répondre aux besoins du télégraphe. L’Europe et les États-Unis ont été reliés à travers les mers en 1858 avec un câble transatlantique. Depuis, les avancées technologiques ont permis leur expansion et leur importance grandissante, notamment en 1988 avec l’apparition de la fibre optique, ou la mise au point du multiplexage avec plusieurs signaux possibles sur la même couleur de fibre. Autant d’innovations qui représentent d’autant plus un enjeu capital de nos jours avec l’explosion de la demande en débit portée par la consommation de vidéos, l’explosion des réseaux sociaux ou encore l’essor du cloud, le stockage de données en lignes et l’importance grandissante de l’intelligence artificielle.
Marseille, 9e hub mondial
Ce contexte explique l’importance que peut revêtir l’annonce du déploiement de « Peace » (Pakistan and East Africa Connecting Europe) entre le Pakistan et les plages du Prado d’ici à 2021. Ce câble haut débit qui relie Marseille au reste du monde place la cité phocéenne à la 9e place des hub Internet mondiaux, après New York et devant Hong Kong. Et ce n’est pas fini, puisque la ville sera reliée à Hong-Kong via AAE-1, une fibre optique de 25 000 km, puis connectée à Singapour avec Sea-Me-We 5, long de 37 000 km, mais aussi le Brésil avec l’opérateur Angola Cables ou encore Virginia Beach avec le câble sous-marin transatlantique privé de Facebook et Microsoft, avec une capacité colossale de 160 téraoctets par seconde.
Nouveaux câbles en prévision
Faute d’alternatives suffisamment viables pour le moment, que ce soit par exemple les satellites de SpaceX ou les drones solaires de Facebook, les câbles sous-marins constituent pendant encore quelque temps de véritables artères de l’économie informationnelle. 100 000 km sont d’ailleurs posés en moyenne encore chaque année. Sans eux, ni les data center auxquels ils sont raccordés, plus d’Internet avec toutes les conséquences funestes que cela pourrait entraîner. Pour la région qui les accueille, c’est aussi une formidable façon de bâtir des écosystèmes numériques ambitieux, comme à Marseille qui permet de connecter quelques 4,5 milliards d’utilisateurs mobiles
Carte des câbles sous-marins accessibles depuis Telehouse
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